Saint Agricol, évêque de l’Eglise qui est à Avignon au VII° siècle, porte un nom qui semble comme le prédestiner à veiller sur les cultures, et la tradition nos rapporte qu’il était invoqué avec succès pour obtenir la pluie dans les périodes de sécheresse. Il est donc important pour nous de ne pas l’oublier dans les temps qui sont les nôtres !
En 1647, il a été déclaré patron de la ville d’Avignon. Et vous-mêmes avez souhaité mettre les Côtes du Rhône sous son patronage.
A quelques jours de sa fête, le 1er septembre, il est heureux que nous puissions nous retrouver, alors que le temps de la récolte approche après le long labeur qui a été nécessaire tout au long de l’année, pour ouvrir cette heureuse période, par la proclamation du Ban des Vendanges.
L‘Eglise d’Avignon, avec le pasteur que je suis ainsi que tous les acteurs de sa vie dont certains sont très impliqués dans le travail de la vigne, se réjouit d’être partie prenante de cet évènement et d’y prendre une place particulière à travers la célébration que nous vivons.
La parole que nous venons d’entendre est celle que la liturgie nous propose pour la solennité de Saint Agricol. Une méditation sur la sagesse tirée du livre de Ben Sirac, et cette page de l’Evangile selon Saint Jean où Jésus se présente comme le pasteur, le berger des brebis pour lesquelles il donne sa vie. Cela, parce qu’il les connaît et qu’il vient leur offrir cette densité de relation que lui-même vit avec le Père. Il nous dit ce désir de Dieu que les hommes aient la vie, qu’ils l’aient en abondance, désir qui ne se donne pas de limites : (v 16) « J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. »
Mais nous pouvons puiser à bien d’autres paroles de l’Ecriture qui nous parlent de la vigne et du soin que Dieu, maître de cette vigne, prend pour qu’elle fructifie.
Au livre du prophète Isaïe :
« Mon ami avait une vigne sur un coteau fertile. Il en retourna la terre, en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins…, mais elle en donna de mauvais. »
Une vigne, c’est une plante qui offre beaucoup de potentialités, à condition que l’on veille sur elle, que l’on en prenne soin, que l’on accompagne sa maturation, qu’on la protège autant qu’il est possible des aléas du climat… pour qu’elle donne du fruit. Et ce fruit devra être recueilli avec attention pour être ensuite foulé, pressuré avant qu’il ne fermente pour se transformer.
Le travail de la vigne, la production du vin, sont à la fois un don (le raisin est le fruit de la terre) et une œuvre de l’homme qui demandent attention, vigilance, patience, compétence… le vin est le fruit du travail de l’homme. Vous savez tout cela tellement mieux que moi.
Cette œuvre est belle. Elle nous dit tout particulièrement la dignité du travail de l’homme, qui œuvre à partir de ce qu’il reçoit, mais déploie toutes ses capacités et son intelligence pour que la récolte se transforme en un vin qui exprime toutes ses qualités.
Dans l’eucharistie, ce mouvement prend toute sa dimension : nous apportons le fruit de la vigne comme un don reçu, mais nous présentons ce fruit transformé par le travail de l’homme, et nous le présentons au donateur en gratitude.
Il est heureux que, au cœur de votre tâche, alors que la vendange approche, nous puissions être invités à entrer dans le cœur de ce mouvement de réception et don.
Dans l’Evangile selon Saint Jean, Jésus utilise lui aussi l’image de la vigne. Et il s’identifie lui-même à la vigne.
(Jn 15) « Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron.Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l’enlève ; tout sarment qui porte du fruit, il le purifie en le taillant, pour qu’il en porte davantage. »
Jésus nous dit ce lien étonnant au Père dans lequel nous sommes intégrés pour vivre de la vie même de Dieu. Nous sommes aimés de la l’amour qui est l’intime de la vie de Dieu. Et c’est cela que nous sommes invités à refléter.
Voyez comme votre tâche est belle est noble. Elle nous introduit au mystère de l’existence où la vie est don, don accueilli, reçu, transformé pour donner un fruit débordant.
Que tout cela nous donne de nous tenir dans la reconnaissance, la gratitude, les chrétiens disent : l’action de grâce. Tout nous est donné, tout est reçu, et nous avons notre part à prendre pour que le don devienne, par le travail de l’homme, ce vin qui éclaire nos rencontres et réjouis le cœur de l’homme. Puissions-nous ainsi refléter la gloire de notre Dieu.
Jésus nous le dit encore : « Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour moi des disciples. »