Gardons la mémoire de celle que l’Église nous invite à vénérer comme la mère de la Vierge Marie, celle donc qui l’a accueillie, accompagnée dans sa vie d’enfant et de jeune fille, qui lui a appris à connaître la parole, à l’accueillir, à la méditer, à la scruter pour, à la plénitude des temps, la recevoir en sa chair et lui donner visage humain.
Avec Sainte Anne, nous sommes donc dans les préparations ultimes des conditions de l’accueil du Sauveur en notre humanité. Ces dernières étapes qui précèdent l’accueil de Celui qui ne peut nous rejoindre que si nous lui faisons place.
Avec Sainte Anne, avec Marie, nous sommes interrogés sur notre disponibilité à la Parole, la manière dont nous l’accueillons et la laissons peu à peu nous façonner, nous conformer au Créateur.
Justement, la parole qui nous est adressée aujourd’hui nous situe dans l’horizon du Royaume des cieux. Cette Bonne Nouvelle que Jésus est venu annoncer, manifester, et dont Il signifie la proximité.
‘Royaume des cieux’, une expression dont nous avons du mal à faire le tour. L’Évangile ne nous en donne pas de définition. Il nous en propose plutôt plusieurs approches à travers l’enseignement de Jésus, et tout particulièrement les paraboles.
Une parabole, une histoire avec ses images et ses comparaisons qui vient éveiller la curiosité de celui qui l’entend, fait entrer en connivence avec celui qui parle, interpelle par ce qu’elle ouvre et ce qu’elle suggère.
Aujourd’hui, pour nous parler du Royaume de Dieu, Jésus nous propose donc trois paraboles : la Parabole du bon grain et de l’ivraie, la Parabole de la graine de moutarde,
la Parabole du levain dans la pâte.Toutes trois nous parlent d’abord d’une initiative.
Le Royaume de Dieu, nous ne le construisons pas nous-mêmes. Nous ne le fabriquons pas par nos propres forces. Il est d’abord le fruit d’une initiative qui nous précède. C’est un homme qui sème… C’est une femme qui enfouit du levain.
Cette initiative est première, elle est discrète… mais il nous est dit qu’elle travaille en profondeur. Car ce qui s’engage à partir de là, c’est un mouvement silencieux, profond, déterminant, un mouvement qui va produire à terme un résultat étonnant : la moisson – l’arbre le plus grand du jardin – la pâte qui lève pour devenir le pain.
Au-delà de l’initiative, et donc du royaume qui nous précède, nous pouvons aussi accueillir d’autres éléments précieux :
- Cette initiative est bonne. Le Seigneur n’a semé que du bon grain. Le mal ne vient pas de lui. C’est le constant enseignement de la Bible depuis les premières pages du livre de la Genèse.
- Cette initiative est aussi un mouvement de don. Large, à profusion (parabole du semeur).
- C’est un mouvement marqué par la confiance et la patience. Mieux vaut supporter la présence du mal que de risquer d’arracher le bien en voulant trier trop vite.
- Durant le temps de son déploiement, le semeur semble accepter que le champ du royaume soit un lieu où se mêlent le bien et le mal.
- Enfin, il y a cette puissance étonnante du Royaume. Le don que Dieu fait, ce don qui peut nous paraître minime, imperceptible, produit quelque chose d’étonnant.
Voilà donc une belle invitation à l’accueil, à la confiance, à la patience. Le don que Dieu fait aux hommes, ce qu’il nous propose est déjà engagé, et est en train de se déployer mystérieusement, mais très réellement. Ne trions pas trop vite. Attachons-nous plutôt à entrer dans ce mouvement de gratuité que Dieu nous propose.
Maintenant, attachons-nous à accueillir cette Parole dans l’horizon de ce que nous vivons dans notre vie d’Église.
Après le temps diocésain du Synode sur la synodalité, le temps de lecture et de réflexion sur la Lettre pastorale, va s’ouvrir cette année une réflexion sur la vie de nos communautés, la manière de les ajuster pour qu’elles soient rassemblées, nourries de la Parole et de l’Eucharistie. Nous réfléchirons également sur la place que nous avons à y prendre les uns et les autres, prêtres, consacrés, laïcs baptisés.
Nous ne sommes pas à l’origine de l’Église. Elle nous est donnée. Nous en sommes membres pour en être nourris et recevoir quelque chose de ce trésor qui nous est offert, de ce don qui nous est fait et qui travaille l’humanité en profondeur.
En écho à la parole de ce jour, demandons à Sainte Anne de nous aider à vivre pleinement en Église, conscients du trésor qui nous est offert, renonçant à trier, à séparer, à purifier… que ce soit autour de nous, au sein de nos communautés, mais d’abord peut-être en nous, confiants en la puissance de ce travail enfoui, qui porte du fruit de manière démesurée, parfois même contre les apparences.
Nous ne sommes pas à l’initiative de ce que nous annonçons et de ce que nous manifestons. Nous sommes appelés à accueillir le Royaume. C’est un autre qui sème.
Et reconnaître le Royaume en germe ne peut se faire vraiment que par un accueil étonné de ce mouvement de l’Esprit qui travaille notre humanité.
Sainte Anne a donné la vie à Marie.
Elle a été témoin du don fait à sa fille, de ce qu’elle a accueilli, de ce qui s’est déployé en elle. Prions-la, qu’elle nous aide à être plus disponibles au mystère du Royaume semé en nos vies et sur notre terre.
+ François Fonlupt
Archevêque d’Avignon
Les reliques de Sainte Anne à la cathédrale d’Apt : c’est une étoffe tissée à Damiette vers 1096. Son culte est attesté dès le XIIe siècle.
Le 8 août 1879, le Pape Léon XIII érige la cathédrale d’Apt en basilique mineure agrégée à Saint Pierre de Rome, en raison de la présence des reliques « qui touchent de plus près à la chair du Seigneur ».
https://www.apt.paroisse84.fr/Decouvrir-le-tresor-de-Sainte-Anne.html