Aux derniers jours de ce mois d’octobre 2023, l’ensemble des personnes occupant les locaux du 7 rue Pasteur à Avignon quitte ces lieux pour rejoindre un autre espace dans l’extra muros d’Avignon. Je m’en réjouis pour les occupants de ce lieu comme pour l’Église.
Ce départ marque la fin d’une longue période d’occupation illégale de ce bâtiment par le collectif Rosmerta, depuis le 1er décembre 2018.
Ces années auront été marquées par bien des étapes et, de manière constante, un dialogue difficile à engager et à maintenir.
Après la reconnaissance de l’illégalité de l’occupation, il pouvait revenir au Président de l’Association diocésaine que je suis, de solliciter auprès de l’autorité préfectorale la mise en œuvre de la décision de justice et demander l’expulsion des occupants. Je n’ai pas voulu m’y résoudre, ne souhaitant pas ajouter de la violence à une situation humaine déjà bien précaire.
Une solution de sortie de cette impasse a pu se préciser grâce à une médiation que j’ai sollicitée et dont je remercie vivement les intervenants. Elle a permis d’ouvrir un horizon de sortie qui se concrétise donc maintenant.
L’Église retrouve ainsi la disposition d’un lieu dont elle est propriétaire pour en user selon ses besoins et pour sa mission. Les résidents trouvent un lieu certainement plus adapté et accueillant et je m’en réjouis pour eux.
Au-delà de cette étape, les mêmes questions demeurent. Qu’en est-il de notre capacité à accueillir et faire place à ceux et celles qui arrivent sur nos terres parce que de bien des manières, ils y sont contraints ?
Les actions de l’Église en faveur de l’accueil des migrants sont réelles même si elles demeurent insuffisantes. Elles mobilisent souvent des moyens importants et discrets dans les diocèses et les paroisses. Il importe de poursuivre dans le concret et aussi dans la conversion que cela appelle de notre part en nous interrogeant sur le regard que nous portons sur l’autre et sur sa dignité de personne humaine.
Je me permets de reprendre ici cette parole très forte que le Pape François a adressée aux participants, jeunes et évêques des Journées Méditerranéennes et aux élus présents au Palais du Pharo à Marseille.
« Certes, les difficultés d’accueil sont sous les yeux de tous. Les migrants doivent être accueillis, protégés ou accompagnés, promus et intégrés. Dans le cas contraire, le migrant se retrouve dans l’orbite de la société. Accueillis, accompagnés, promus et intégrés : tel est le style. Il est vrai qu’il n’est pas facile d’avoir ce style ou d’intégrer des personnes non attendues. Cependant le critère principal ne peut être le maintien de leur bien-être, mais la sauvegarde de la dignité humaine. Ceux qui se réfugient chez nous ne doivent pas être considérés comme un fardeau à porter : si nous les considérons comme des frères, ils nous apparaîtront surtout comme des dons. »
Pape François, discours au Palais du Pharo à Marseille, 23 septembre 2023
Ces paroles sont exigeantes. Au terme d’une étape difficile vécue à Avignon, et dont je me réjouis de l’aboutissement paisible, qu’elles nous appellent tous, croyants mais aussi hommes et femmes de bonne volonté, citoyens et collectivités, à nous interroger et nous mobiliser sur nos capacités et nos énergies pour un accueil réel des personnes qui sont sur notre territoire.
+ François Fonlupt
Archevêque d’Avignon